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Dernière divagation autour de la Kinésithérapie !
 
Nous l’avons dit, la kinésithérapie est une belle profession mais… !
 
Mais il reste à essayer de répondre à la question essentielle pour cette profession dont l’évolution est construite depuis plusieurs décennies sur des erreurs stratégiques, sur de mauvais choix basés uniquement sur les intérêts de ceux qui se disent représentatifs.
 
Il nous faut trouver une ou plusieurs réponses sur l’avenir de la kinésithérapie.
 
Et à l’aube du nouveau quinquennat qui s’ouvre sous la Présidence d’Emmanuel MACRON c’est le moment de « tirer des plans sur la comète » ! 
 
Alors si la kinésithérapie a un avenir, quel peut-il être ?
 
Ce dont nous sommes certains c’est que cet avenir sera un chamboulement profond. Cela, sans être exhaustif, pour plusieurs raisons :
Le passé de la profession et les erreurs cumulées sont un véritable passif ou handicap pour rester dans un jargon connu.
Le désintérêt de la grande majorité des professionnels pour autre chose que leur quotidien. Qu’ils soient salariés ou libéraux.
Le niveau de formation volontairement limité pour éviter de placer la kinésithérapie en véritable contributrice de la santé publique en collaboration avec la médecine et en responsabilité.
La concurrence entre les professions de santé et les nouveaux métiers qui ont été adoubés comme participants à la santé au sens large. Nous avons dans le champ des professions de santé réglementées les autres professions de rééducation avec les ergothérapeutes, les psychomotriciens, les pédicures-podologues, mais aussi les infirmières, les orthoprothésistes, les sages-femmes et certains docteurs en médecine. Et hors santé réglementée il faut ajouter : les STAPS et pas seulement les APA, les ostéopathes, les chiropracteurs, les éducateurs, les coachs en tout genre, les masseurs formés ou non. A parier que d’autres gourous arriveront bientôt sur marché avec les projets d’uberisation, traduisons dérèglementation au nom de la liberté d’entreprendre. 
 
Vous noterez que nous n’en sommes plus à parler des rémunérations, des conditions d’exercice, ni de la guerre continuelle entre les 2 représentatifs, ou du CNOK, arme de destruction massive de la kinésithérapie qui n’a aucune indépendance et fait le jeu des gouvernements par crainte de la perte de ses privilèges.
 
Par contre il serait mensonger et hypocrite de ne pas prendre en compte le mouvement engagé et poursuivi par les élus de la nation et les ministres quel que soit leur bord, de la casse des hôpitaux et de l’expansion du déremboursement.
 
Ce mouvement « En Marche » du démantèlement du système de santé Français sera « compensé » par les Maisons de Santé, les Réseaux de Soins et les Parcours Patients dans une maîtrise des coûts calculés sans référence à la qualité des soins mais uniquement du point de vue d’une économie impitoyable et sans humanité. 
 
Alors, dans ce contexte, si la kinésithérapie a un avenir, quel peut-il être ?
 
Nous voyons quatre pistes possibles : la prévention, l’ambulatoire, la spécialisation autour du handicap et la disparition.
 
Commençons par la disparition car cette notion est à géométrie variable. C’est-à-dire que cette disparition est déjà bien entamée dans l’exercice salarié et qu’à seulement quelques exceptions possibles, cela ne s’arrêtera pas. Puis, si la profession ne se remanie pas pour changer de paradigme dans l’exercice libéral, la disparition touchera les libéraux.
 
Les trois autres pistes, même si elles permettent la survie de la kinésithérapie, il faut être persuadé que cela ne sera pas dans une dynamique de « monopole » et d’indépendance. 
 
Depuis plusieurs décennies les compétences des kinésithérapeutes sont mises en pâtures au partage et cela ne s’arrêtera pas sauf si le kinésithérapeute prend conscience et accepte de ne plus se sentir « seul au monde ».
 
Le kinésithérapeute doit accepter d’être un des éléments des prises en charge.
La kinésithérapie est une des composantes des prises en charge et qui dit composantes dit complémentarité, dit réseau, dit regroupement.
 
Sauf à être reconnu dans un domaine très spécifique, de maîtriser parfaitement les compétences liées à ce domaine et à condition que la pratique nécessite un acte individuel, ou que cela soit expressément demandé par le patient, le cabinet de kinésithérapie de faible surface, de peu d’équipement, n’a plus d’avenir. Peut-être résistera-t-il encore quelques années s’il s’inscrit dans un réseau mais le sursit sera de courte durée.
 
Pour la prévention, la concurrence et les perspectives annoncées font que celle-ci ne pourra s‘envisager en « entreprise » ou « collectivité » qu’avec une vision globale associant ergonomie et économie. Et pour les actions de préventions aux gestes et postures, à la chronicité, au vieillissement, elles se feront par groupe car il est démontré depuis longtemps l’impact favorable du groupe sur chacune des individualités composant le groupe. Ce qui implique surface et équipements sans oublier probablement que l’efficacité sera considérée étant optimisée par des interventions pluriprofessionnelles. Dire l’inverse serait allé à l’encontre de la « Poule aux œufs d’Or » des hôpitaux que sont les hôpitaux de jour et l’éducation thérapeutique.
Attention, il n’est pas question de contester l’efficacité de ces deux concepts mais de ne pas rester muets et de ne pas nier les nombreux abus dans ces domaines qui coûtent.
 
Si la notion de handicap peut être large, il est certain que le handicap qui serait destiné à l’action de la kinésithérapie, est un handicap lourd. Vous comprendrez que cela implique également des moyens importants et que certains handicaps ne peuvent être pris en charge qu’en complémentarité avec d’autres professionnels tel que orthophonistes et, ou, orthoprothésistes et, ou, éducateurs, etc..
 
Quant à l’ambulatoire, le parcours patient, le réseau de soins, seront les deux conditions sine qua none pour y participer.
 
Avant de clore cette dernière divagation, il est à noter que la géographie est un facteur important à prendre en compte dans l’avenir de la kinésithérapie. En effet, en région à densité de population concentrée, la proximité de différents professionnels permet d’imaginer des réseaux de soins, des parcours patients, assez courts. Y compris de concevoir des Maisons de Santé « éclatées » où médecin, infirmière, kinésithérapeute, sont dans faible périmètre de marche.
 
A l’inverse, dans des régions à faible densité, les Maisons de Santé se doivent, sous un même toit, de regrouper la pluri professionnalité indispensable au parcours de soins coordonnés.
 
Et pour ce qui concerne la kinésithérapie, ce sont les plateaux techniques conséquents en kinésithérapeutes, en surface et matériels y compris piscine, activités de plein-air, et pouvant recevoir d’autres professionnels de la rééducation, qui sont l’avenir de la kinésithérapie.
 
Que ces plateaux soient incluent dans une Maison de Santé, ou au carrefour de Maisons de Santé proches.
 
Les kinésithérapeutes doivent se regrouper pour proposer des structures polyvalentes, des offres de soins multiples à haute technicité, des parcours de rééducation par ateliers, des prises en charge de groupe avec capacité d’une individualisation si besoin.
 
Les kinésithérapeutes doivent se regrouper pour partager les financements nécessaires à ces plateaux techniques modernes, spacieux, équipés, qui sont la voie de leur avenir et de la survie de la kinésithérapie.
 
Il y a un avenir pour la kinésithérapie mais les kinésithérapeutes sont-ils prêts à le construire ?
 
La réponse sera donnée par les faits que la profession réalisera.
 
 
Didier Lantz