Nuages

La kinésithérapie est une belle profession.

Elle allie savoir faire et relation humaine ou comme certains pourraient le dire, savoirs théoriques et savoirs pratiques au service des autres le tout alimentant les savoirs expérienciels clés de la maturation de chaque professionnel au bénéfice des patients dont il a la charge.

 

Les kinésithérapeutes, les études sociétales en attestent, comptent parmi les professionnels de santé les plus appréciés des patients.

 

Ces deux premiers constats permettent de dire que la kinésithérapie est une belle profession.

 

La kinésithérapie est une belle profession mais... !

 

Mais quoi ?

 

Mais elle est sinistrée dans l'exercice salarié.

 

Mais elle est bloquée dans les négociations conventionnelles.

 

Mais elle est gelée dans la reconnaissance de profession intermédiaire indispensable au système de santé.

 

Et des "mais" il y en a d'autres mais pourquoi ?

 

Parce que la kinésithérapie n'est ni soutenue, ni reconnue et que ceux qui sont dits représentatifs et dont le boulot est de la défendre ont accumulé une succession d'erreurs qui d'année en année a fait sombrer la kinésithérapie dans un "triangle des Bermudes" où personne ne sait ce qui s'y fait.

 

En effet, derrière les apparences flatteuses que constatons-nous ?

 

Les kinésithérapeutes sont appréciés des patients mais combien de commentaires circulent avec des : "je le vois pour me brancher et me débrancher", "il passe d'un boxe à l'autre", "nous sommes 3, 4, en même temps", "j'ai fait le même exercice toutes mes séances", etc...

 

A l'hôpital ce n'est pas mieux : "le kiné, il est gentil, il est passé me dire bonjour", "le kiné ! quel kiné ?", "en 1 semaine, je n'ai vu personne", "il est très bien mais il est toujours appelé pour une urgence", etc...

 

Et peu importe si ces commentaires sont minoritaires, ce sont ceux qui sont retenus.

 

Les kinésithérapeutes sont appréciés des patients mais quelles associations de patients s'élèvent pour défendre la place des kinésithérapeutes dans le système de santé ? Quelles associations de patients militent pour la revalorisation et la reconnaissance de la kinésithérapie ?

 

Tournons-nous du coté des médecins qui connaissent l'intérêt d'avoir des kinésithérapeutes et nous obtenons : "je ne sais pas ce qu'il fait", " je n'ai jamais de courrier", "j'ai un bon kiné, c'est à lui que j'envoie mes patients, les autres j'ai arrêté"...

Et du côté des hospitaliers si le discours est différent, il n'en est pas moins inquiétant : "en réa j'aimerai bien avoir des kinés mais comme il n'y en a plus, nous avons formé les infirmières", "on se débrouille, on fait sans", etc... Et nous pouvons constater que les postes sont progressivement transformés pour des APA, des ostéopathes, des coachs sportifs, et avec des glissements de tâches vers les infirmières, les aides-soignantes, les ergothérapeutes, les psychomotriciens. Cela avec des économies et des DRH ravis de pouvoir supprimer des postes qui ne sont pas utilisés.

 

Il n'est même pas la peine d'aborder les conditions de travail en milieu hospitalier qui, sauf exception, sont tellement dégradées, voire n'ont jamais évoluées depuis 30 ans, qu'aucun professionnel ne veut travailler dans de telles situations. Si en plus vous croisez des chefs de services, professeurs d'université, qui sans frémir vous disent : "je recrute des APA au moins ils ont un master", ou "pourquoi vouloir des équipements, faire marcher les patients dans le couloir c'est suffisant", et bien vous complétez le panel des situations qui font fuir les kinésithérapeutes de l'exercice salarié.

 

Les conditions de travail en libéral, ne sont pas forcément plus enviables. Horaires à rallonge, patients qui ne viennent pas sans prévenir, submergé par des prescriptions alors que les rendez-vous sont déjà plus que complets, prescriptions fantaisistes incompréhensibles, marathon pour ceux qui continuent à faire de la kinésithérapie au domicile des patients, conditions tarifaires qui ressemblent plus a de l'escroquerie institutionnelle qu'a une réelle valeur du travail, charges qui augmentent d'année en année...

 

La kinésithérapie est une belle profession mais a-t-elle encore un avenir ?

 

Didier LANTZ

(les commentaires attribués aux patients ou aux médecins, ne relèvent pas de la fiction, ils ont été collectés lors d'échanges et de discussions ainsi que les situations décrites)