Nuages

Il y a quelques jours la présidente du conseil national de l’ordre, madame Pascale Mathieu, nous a congratulé d’une lettre portant une autosuffisance et une autosatisfaction de notre ordre qui est simplement hilarante.

Explication de texte...

 

Chères consœurs, chers confrères,

Nous sommes confrontés à une situation inouïe qui a balayé la planète et a mis à mal en à peine quelques semaines notre système de santé, notre économie, notre mode de vie.

 

Cette première annonce montre toute la différence d’analyse que l’on peut avoir.

Notre système de santé s’est parfaitement comporté et au contraire. Il a montré toute sa faculté d’adaptation face à une crise contre laquelle les pouvoirs publics avaient tout mis en place pour que ce soit un échec. Mais je ne parlerais pas ici des catastrophiques politiques de santé édictées depuis ces 20 dernières années.

Les soignants ont fait preuve de courage et d’abnégation démontrant toute la cohésion et toute la puissance qu’ils étaient capables de mettre en oeuvre.

Mais n’étant pas né de la dernière pluie, je vois bien là un argument pour commencer à se dédouaner des décisions prises...

 

Personne n’avait prévu ni n’aurait pu imaginer un tel bouleversement en si peu de temps.

Toutes nos certitudes ont vacillé, nous avons dû nous adapter, repenser notre quotidien, nos relations avec autrui, nos projets, nos envies, et attendre, sidérés, impuissants, en proie à la peur de voir nos proches contaminés, ou d’être contaminés nous-mêmes.

 

Effectivement, nous avons bien cerné le fait que le CNO était en proie à la peur.

 

Bien que professionnels de santé, nous n’étions néanmoins pas préparés à ce que nous avons dû affronter.

 

Peut être que madame Mathieu parle pour elle ou pour le CNO, mais les simulations pandémiques existent depuis des lustres et pour rappel, nous avons déjà été confronté et formés (pour les plus anciens) au SRAS, H1N1…

Ainsi, si le CNO n’a jamais émis l’hypothèse d’une possible pandémie, c’est de sa seule responsabilité.

Mais qu’il ne parle pas en notre nom à toutes et à tous car depuis le mois de décembre, beaucoup ont avancé les possibilités d’une pandémie, certains s’y sont préparés. D’ailleurs, certains labels et certifications avancés par des ordres professionnels incluent des critères d’endiguement épidémique.

L’exemple italien n’a donc servi à rien pour n’avoir aucune anticipation ?

D’un autre côté il est vrai qu'à cette époque certains étaient certainement à préparer leurs vacances dans l’océan indien... Chacun ses priorités !

Mais non madame la présidente, n’appliquez pas les lacunes du CNO à l’ensemble des kinésithérapeutes.

Quand bien même on ait pu négliger ce qui s’est déroulé en Italie, dès l’apparition des premiers clusters en France, le CNO aurait du se préparer, demander aux sociétés savantes de plancher sur le sujet. Malheureusement le CNO à ce moment là, était aux abonnés absents.

Le CNO doit assumer le fait de n’avoir rien anticipé de ne pas avoir accompagné la profession dès le début de la crise. Le CNO aurait dû assurer la promotion de la profession. Les kinésithérapeutes, merci à eux, ont pris leurs responsabilités et se sont engagés massivement face à l’absence de propositions du CNO.

 

Certains d’entre nous ont travaillé dans des établissements de santé parfois mal équipés, en sous effectifs, en proie à l’épuisement et à l’incertitude. D’autres ont dû rester chez eux, en raison de leur santé ou pour garder leurs enfants. Certains encore ont assumé des soins à domicile pour prendre en charge des patients dans des conditions souvent inacceptables, sans masques dans les premières semaines. D’autres encore ont maintenu le lien avec leurs patients bénévolement, en leur prodiguant des conseils, des soins par téléphone ou vidéo, jusqu’à la parution tardive de l’arrêté autorisant le télésoin.

 

Et la totalité a subi la fermeture non justifiée des cabinets... il est bien beau de reporter la faute sur les autres, mais le CNO ne se dédouanera pas de la sorte. Il faut qu’il assume pleinement qu’il ait demandé la fermeture des cabinets et que nombre d’entre nous se sont retrouver en inactivité à cause de cela. Et cette demande de fermeture est directement liée au total manque d’anticipation du CNO et à l’absence de promotion de la profession. Il est même surprenant de constater que jusqu’au lundi 16 mars nous suivions les directives de la DGS et des ARS pour l’accueil des patients “non covid” et “covid” et que d’un coup, le mardi 17 mars nous devenions dangereux et vecteurs de propagation et donc limités aux seuls soins vitaux à domicile, sans que ni la DGS ni les ARS ne prennent partie dans ce sens.

 

Je sais à quel point les deux derniers mois ont été difficiles. Ils l’ont été pour tous les Français mais peut-être encore plus pour nous, soignants, confrontés à une maladie dont on ne savait rien.

 

Si vous permettez, les soignants étaient au combat, les déserteurs dans leur canapé ! Et malheureusement c’est la maladroite communication de notre propre CNO qui a rendu déserteurs une grande partie d’entre nous, à leur insu…

 

Depuis l’apparition du virus sur notre territoire, j’ai tenu à ce que l’Ordre assume pleinement son rôle de guide en établissant une doctrine commune pour notre profession. 

 

Son rôle de guide ? Le CNO a donc instauré un climat anxiogène, supprimé le libre arbitre des kinésithérapeute et se prend pour un guide... Le CNO est il devenu une nouvelles secte ? Les doctrines sanitaires sont elles du rôle de l’ordre et non des société savantes ? Doit-on considérer que ce que l’HAS est moins compétente que l’ordre pour édicter une doctrine sanitaire ?

 

Les Conseillers nationaux et moi-même nous sommes attachés à établir des recommandations adaptées à la situation épidémiologique et aux consignes gouvernementales.

Nous avons dans un premier temps rassemblé toutes les informations dont nous pouvions disposer, répondu à vos questions le plus rapidement possible. Foire aux questions, infographies, guides pratiques, nous vous avons assisté de la façon la plus pratique possible.

 

Oui effectivement, dans un premier temps, dès l’apparition du virus sur notre territoire, le CNO est parti au soleil... peut être n’avais-je pas compris le message, en fait il fallait comprendre que nous devions tous partir en vacances au soleil... J’ai manqué ce message caché !

Heureusement que les CDO ont été disponibles car le CNO n’a vraiment pas été un modèle...

 

Pendant toute cette période, les élus ordinaux, dans vos conseils départementaux, régionaux et national se sont mobilisés à vos côtés. Ils sont comme vous kinésithérapeutes en exercice, leur travail dans les hôpitaux, les établissements de santé, les EHPAD et à domicile, ainsi que leurs investigations dans leurs territoires nous ont permis de suivre précisément la situation et les difficultés que vous avez pu rencontrer.

 

Juste pour mon information personnelle, combien d’élus dans les premiers clusters ? Et de fait, quelles informations ont été remontées ?

 

Forts de ces informations de terrain, nous avons sans relâche rappelé la place des kinésithérapeutes dans la gestion de la crise. Nous avons alerté le gouvernement sur les problématiques que vous rencontriez, relayé vos inquiétudes et vos difficultés.

J’ai ainsi alerté à plusieurs reprises le ministère des Solidarités et de la Santé ainsi que les ARS, notamment sur le manque parfois dramatique d’équipements de protection individuelle ou encore sur la situation financière inquiétante des kinésithérapeutes libéraux qui ont fermé leurs cabinets. J’ai également demandé aux collectivités et aux préfectures de veiller à inclure les kinésithérapeutes lors des distributions de protections et notamment de masques.

A tous les échelons de l’Ordre, vos conseillers ordinaux ont également sollicité leurs élus pour faire entendre votre voix. Grâce à ces interventions, plus de 60 députés et sénateurs ont sollicité le Gouvernement sur les sujets essentiels pour notre profession pendant cette crise sanitaire, comme les difficultés économiques des professionnels de santé libéraux, la pénurie de kinésithérapeutes en établissements de santé ou encore l’ouverture du télésoin à notre profession.

 

Fermez vos cabinets, que des soins vitaux car les kinésithérapeutes sont de dangereux vecteurs de propagation et que leurs actes n’en valent pas la peine... Voilà le message du CNO. Effectivement, c’est porteur !

 

Remettons un point en place s’il vous plait.

Lorsque l’on envoie un signal fort au ministère, « les cabinets sont fermés », pensez vous réellement que du coup ce même ministère mette tout en oeuvre pour fournir le matériel nécessaire aux pauvres glandus qui soient restés sur le terrain ? (Et le terme « glandus » n’est pas du tout péjoratif mais décrit la situation dans laquelle nous étions).

Parce que avant même le 17 mars, les glandus dans les clusters étaient déjà confrontés au virus pendant que vous étiez en outre-mer. Et je n’ai pas vraiment souvenir de quelques communications de l’ordre ni même de soutien à cette époque...

Nous avons assuré notre mission de santé publique, nous avons assumé nos responsabilités. Le tout sans soutien de votre part ni consignes. Et nous avons bien mieux géré que vous ne l’avez fait. Mais encore fallait il que vous fûtes sur le terrain a ce moment.

Les kinésithérapeutes ont pris leurs responsabilités, ils ont mesuré avec leur libre arbitre les bénéfices et les risques, ils ont participé conjointement avec les préfets au maintien de la continuité des soins en prenant toutes les mesures barrières nécessaires. Montrant par là même que la profession est mature, capable de respecter les protocoles dictés et digne de confiance.

On récolte ce que l’on sème madame la présidente.Le CNO a semé l’arrêt de la kinésithérapie, il récolte le mépris des tutelles.

Il a semé l’arrêt des prises en charges, il récolte les plaintes des associations de patients.

Il a semé le chaos, il récolte la révolte. 

Il a montré que la kinésithérapie ne servait à rien il reçoit la dévalorisation de notre profession aux yeux du monde médical et auprès de nos patients.

 

Je sais que vous avez été nombreux à solliciter les élus départementaux et je les remercie ici de s’être rendus si disponibles.

Je sais aussi que certaines décisions que nous avons prises ont été mal comprises. 

 

Oui le CNO aurait du prendre le temps, non pas de mieux les expliquer, mais prendre le temps de la concertation des sociétés savantes. Prendre le temps, dès la fin février, de considérer les kinésithérapeutes comme des gens responsables et doués d'un savoir et d’une analyse qui leur permet d’apprécier la balance bénéfices risques.

En lieu et place le CNO nous a gratifié d’un argument d’autorité en se réveillant une fois la bataille engagée et en supprimant le libre arbitre des professionnels.

 

A l’évidence nous aurions dû prendre le temps de mieux les expliquer, même si du temps nous n’en avions pas, tant les questions étaient pressantes et les attentes grandes, nos décisions évoluant en fonction des changements de la situation épidémiologique et des informations dont nous disposions.

 

Non les décisions ont été parfaitement comprises. C’est la communication ordinale, que l’on ne saurait même pas qualifier. Incohérente ? Contradictoire ? Stupide ? Concurrente à Sibeth Ndiaye ?

Comment peut on incriminer la compréhension des kinésithérapeutes alors qu’en quelques jours tout et son contraire a été dit. Les CDO allant à l’inverse du CNO, ce dernier  changeant sa version tous les jours !

La compréhension des kinésithérapeutes est parfaite, c’est la minable communication de l’ensemble du système ordinal qu’il faut remettre en cause, laissant penser qu’il y a un manque total de données scientifiques sérieuses à l'appuie. Les responsables de ces communications doivent démissionner, c’est le minimum nécessaire. Les kinésithérapeutes n’ont même pas reçu un courrier et ne sont pas tous abonnés à twitter !

Reporter la faute sur les kinésithérapeutes est insupportable, indigne et inadmissible.

 

Nous avons fait des choix guidés par l’intérêt collectif pour protéger votre santé et celle de tous nos patients.

 

N’aviez vous pas parlé de peur un peu plus haut ?...

Et la science dans tout cela ? Auriez-vous des demandes ministérielles ou de la HAS demandant la fermeture des cabinets à nous fournir ? Le CNO produira-t-il les avis des sociétés savantes qu’il a consulté en amont des décisions ?...

Les kinésithérapeutes doivent ils demander une commission parlementaire pour statuer sur l’avenir législatif du conseil de l’ordre ?

Donnerez vous des réponses, jouerez vous la transparence, ou doit on vous y contraindre ?

 

Vous avez constaté que certains de nos efforts ont payé puisqu’enfin nous sommes dotés dorénavant de masques en nombre important, permettant de prendre en charge nos patients avec plus de sécurité. 

 

C’est une blague ? Même les ostéopathes ont des masques en dotation, alors les efforts du CNO, permettez moi d’en rire...

Dès les premières dotations je vous ai alerté sur cette problématique, 2 mois avant de voir le CNO communiquer sur le sujet… Top réactivité !

 

Même s’il est regrettable que le gouvernement ait tardé à répondre à nos besoins, c’est aujourd’hui chose faite.

J’ai alerté également les pouvoirs publics sur la situation inéquitable que subissent les kinésithérapeutes qui se voient refuser l’accueil de leurs enfants dans les établissements scolaires contrairement à d’autres professionnels de santé. Je suivrai également ce dossier et ne manquerai pas de vous tenir informés de son évolution.

 

Nous allons le redire, mais quand le CNO demande aux kinésithérapeutes de fermer leurs cabinet, le gouvernement se dit « comme cela ils garderont leurs enfants, un soucis de moins ». C’est le CNO qui est responsable de cet état de faits.

Il ne faut pas venir pleurer de conséquences de ses actes, il faut les endosser pleinement.

 

Néanmoins la situation sanitaire de notre pays ne nous permet pas un retour à une vie normale dans l’immédiat. A la crise sanitaire s’ajoute une crise économique sans précédent, que vous subissez aussi.

L’Ordre n’est pas impliqué dans les négociations relatives à des aides financières. Ceci incombe à vos syndicats représentatifs.

 

Cette phrase est admirable... C’est donc l’ordre qui nous a plongé dans une situation financière complexe en demandant de fermer les cabinets, mais parallèlement il ne peut rien sur les aides. C’est beau... Cela confirme ce que beaucoup pensent. L’ordre ne sert qu’à nous em*erder ! Merci pour cette démonstration !

 

Mais nous avons une mission d’entraide professionnelle, à laquelle nous consacrons chaque année un budget important.

 

Si le CNO souhaite réellement nous aider... Qu’il commence par nous laisser agir, nous kinésithérapeutes de terrain, et qu’il passe la main à une autre équipe plus à même de gérer la situation.

 

C’est ainsi que nous finançons avec les autres ordres une plate-forme d’appels téléphoniques vous permettant de recevoir une aide et une écoute en cas de besoin. 

Mais nous souhaitons aller plus loin. C’est pour cela que j’ai demandé au Conseil national la possibilité de débloquer une aide exceptionnelle pour vous assister dans cette période difficile.

C’est plus d’un million d’euros que nous avons décidé de mobiliser. Ce fonds exceptionnel a permis de faire fabriquer 60 000 visières de qualité, confortables, durables, afin de mieux vous protéger lors des soins que vous prodiguerez à vos patients. Elles sont en cours de distribution.

Il doit aussi doter une enveloppe d’entraide pour soutenir financièrement nos confrères qui auraient été trop durement touchés par les conséquences de la fermeture des cabinets. Les conditions d’attribution, en cours d’élaboration, vous seront communiquées prochainement.

 

1 million d’euros... belle annonce. Dit autrement c’est juste un peu plus de 10€ par kinésithérapeute, étrangement cela ne donne pas le même effet dit ainsi...

Vous n’oublierez pas non plus que c’est l’argent des kinésithérapeutes et pas celui du CNO...

À un moment j’ai cru que vous alliez annoncer que les élus du CNO renonçaient à leurs indemnités des mois de mars et avril. Cela aurait été solidaire et aurait permis de payer les visières.

 

Enfin nous devrons tirer les enseignements pour notre profession des suites de cette crise sans précédent.

Les kinésithérapeutes ont un rôle central à jouer dans ce qu’on appelle déjà « le monde d’après ». Cet épisode bouleversant doit nous permettre de repenser le système de santé ; cela doit devenir une priorité dans la nouvelle ère qui s’annonce.

 

Nous partageons totalement votre analyse. Nous allons tirer les enseignements de cela. L’ordre devra justifier ses choix et répondre de ses actes.

Le renouvellement du CNO à venir va être intéressant, car tant les kinésithérapeutes que les élus ordinaux ont des comptes à demander... Et j’invite tous les élus nationaux, en désaccord avec la politique menée, à prendre leurs responsabilités et de tout mettre en oeuvre pour que l’équipe sortante, sorte mais ne re-rentre pas.

 

Vous êtes au cœur de l’offre de soin et j’ai besoin de votre avis.

Dans quelques semaines nous lancerons une enquête pour recueillir vos contributions. Elles serviront de base à l’élaboration d’un document destiné à alimenter cet indispensable débat national.

Le temps est venu pour notre profession de faire valoir son apport indispensable à la bonne santé de nos concitoyens.

Je sais pouvoir compter sur votre engagement. Il en va de la santé de tous.

 

Si aucun syndicat n’osera vous le dire frontalement, mais l’offre de soins, n’est pas une prérogative de l’ordre. Et même si le CNO a déjà trop largement empiété sur ce terrain, il serait bon que le CNO se souvienne de ses missions et uniquement de celles-ci.

 

Soyez assurés, chères consœurs, chers confrères, de mon engagement à vos côtés, de mon admiration pour votre action et de mon soutien sans faille.

Pascale MATHIEU

Présidente du Conseil national de l’ordre

des masseurs-kinésithérapeutes

 

Soyez assurée, madame la présidente, que les kinésithérapeutes n’oublierons pas et qu’ils ne sont pas de gentils moutons que l’on « guide ». Les décisions ne peuvent plus être prises par une poignée d’élus sans aucun contre-pouvoir, mais à minima en concertation depuis les CDO vers le CNO et non l’inverse. La structure pyramidale dans laquelle le CNO s’est placé devra rendre des comptes et je n’ai cessé de le dire, assumer.

S. Flori, V. Jallu