Nuages

Voilà c'est désormais fait, le SNMKR a ouvert sa plateforme négo-kiné au vote général concernant l'avenant numéro cinq de notre convention.

Ne soyons pas dupe, l'avenant N°5 n'a rien à voir avec le N°5 d'un célèbre parfumeur mais est bel et bien un piège sur le long terme.

À la première lecture de la plate-forme, je suis heureux de voir que le SNMKR a suivi quelques unes de mes propositions (à lire).

Cependant, au final la dite plate-forme a toujours quelques soucis.

L'identification par mail n'empêche en rien de voter plusieurs fois et la confirmation d'inscription ne fonctionne pas toujours et surtout, on ne peut aucunement vérifier que la personne qui vote soit bel et bien un kinésithérapeute conventionné !

Que les représentants des divers syndicats qui ne voient que par la démocratie participative aillent lire le texte que j'ai écrit sur le sujet... (à lire)

Autant le dire tout de suite, monsieur Revel, je vous en prie, vous voulez que l'avenant soit signé par le SNMKR, pardon, par l'Union ? Et bien c'est assez simple, faites voter l'ensemble des employés de la CNAM et vous aurez largement plus de voix que celles des masseurs-kinésithérapeutes !

Nous dirons merci au SNMKR...

 

Union vs SNMKR

Encore une fois je suis surpris de lire que le SNMKR ceci, le SNMKR cela... Cependant, juste histoire de rappeler un point important, le SNMKR n'est pas représentatif. C'est l'Union qui l’est.

Où est donc passé l'Union ? Où sont les membres d'Objectif Kiné (OK) ?... Nul part, pas une seule fois dans l'ensemble des discussions je n'ai pu lire ou voir intervenir un membre d'OK ! Étrange n'est-il pas ?

Non, pas si étrange que cela. Le SNMKR semble être dans un but purement commercialo-syndical. Comme je vous l'ai expliqué dans mon article sur la modification des URPS (à lire), les syndicats, si ils souhaitent conserver ou devenir représentatifs auront tout intérêt à être de bons et loyaux toutous auprès des tutelles. Il devront faire amende honorable pour ne pas être écartés...

Et bien voilà. Je pense que le SNMKR a fait son choix et fait tout pour nous expliquer que cet avenant n'est pas si mal que cela. La réalité est que, et je reprends les chiffres annoncés par le SNMKR, au mieux les mesures rapporteront en moyenne 1326€ par an et par praticien en 2019 soit 110€ par mois et au pire 668€ par an soit 56€ par mois. Êtes-vous prêts à vendre votre profession pour 86€ par mois en moyenne sur 4 ans ?

Moi non !

D'autant qu'aucune de ces mesures ne prend en compte le fait que nous allons au mieux être victime d'une augmentation de 1,7% de CSG dans les mois à venir.

Faites le calcul...

Ce qui est sur, c'est que le SNMKR, a fait un raz de marrée sur les réseaux sociaux pour nous convaincre que cet avenant était une bonne solution. Et malheureusement quelques "lieutenants" du SNMKR ont eu des propos qui n'étaient pas toujours très adaptés sur ces dits réseaux. Ainsi j'ai profondément été outré quand j'ai pu lire qu'un professionnel de santé (du moins qu'il prétend être) a osé dire ouvertement "je prends l'argent là où il est". Si la démarche "commercial" peut être « entendable », d'un professionnel qui se veut être au service des malades, je trouve cela très irrespectueux et contraire à l’éthique.

À vouloir trop en faire, on en fait de trop comme le dirait monsieur de la Palice et c'est le piège dans lequel le SNMKR est tombé.

Ceci étant dit, je remercie le SNMKR pour la diffusion du document qui serait le projet d'avenant numéro cinq ainsi que ses annexes. De mémoire c'est la première fois que cela se fait. 

 

Le filouterie est dans les détails

Vous l'avez certainement remarqué, les débats autours de cet avenant font que nous parlons beaucoup des revalorisations mais peu de gens ont eu la curiosité de lire en entier le document. 

Sur les rémunérations, j'avais chiffré il y a quelques mois pour Alizé, à 90 millions d'euros par an, au mieux. Nous sommes finalement à 287 millions sur 4 ans soit en gros 70 millions par an. Je vous avoue que je suis assez assez satisfait que mon analyse fut la bonne, et en même temps, comme je le disais à l'époque, profondément déçu que ce ne soit que si peu.

D'autant que comme souvent dans ce genre de texte, le pouvoir est dans le détails...

En effet, l'un des effets positifs du conventionnement sélectif, est de permettre aux titulaires de pouvoir à nouveau négocier leur départ en retraite ! Et oui, la signature du précieux document signifiant le nom du repreneur va se vendre très cher !

Il est important que les jeunes diplômés et les futures professionnels enclin au déménagement fassent bien attention à tout ceci.

Il serait peut être même intéressant de voir si quelques partisans de cet avenant ne seraient pas en zone sur-dotée et proche de mettre leur cabinet à la vente... 

 

Notez aussi que les avis de la commission paritaire départementale (CPD) doivent être rendus à la majorité des deux tiers. Les CPD étant composée à part égale des représentants des caisses d'assurance maladie et des représetnants syndicaux, autant dire que la majorité des deux tiers ne sera obtenue que si les représentants de l'assurance maladie le souhaite !

On appelle cela une démocratie "orientée".

 

Notons aussi que l'UNCAM commence à introduire la notion d'"activités spécifiques". N'osons pas dire « spécialisation"...

Il va falloir suivre cela de très près. Car non seulement nous n'imaginons pas la portée que peut avoir cette distinction mais avec ces activités spécifiques, l'UNCAM introduit aussi un volume nécessaire pour maintenir le conventionnement. Cette épée de Damoclès est effroyable... Autant je suis favorable à un quota général, autant imposer un volume d'actes spécifiques me semble ubuesque.

Relevons aussi le contrat d'exercice temporaire, qui si il peut paraitre anecdotique, montre que l'UNCAM a pensé le conventionnement sélectif depuis des années et a déjà mis en place un certain nombre de mesures à venir.

 

N'en doutons pas une seule seconde, les dindons de l'histoires seront tous kinésithérapeutes !

Nous retrouvons les mêmes notions d'actes minimums dans les différents contrats d'incitations. Ces derniers étant justement "contractuels", cela n'est pas dérangeant, vous savez quand vous signez. Pensez tout de même que les chiffres avancés, à bien y calculer, ne sont pas si "évidents" que cela à réaliser et me laisse penser que nous n'avons pas fini de lire et d'entendre parler de conflits engendrés entre les caisses et les professionnels au sujet de ces contrats.

Bien noter aussi sur ces contrats les conséquences d'une modification de zone.

Ces contrats d'incitations sont très dangereux pour les nouveaux diplômés qui se lanceraient dans l'aventure. Je pense que sans expérience de création d'activité au préalable, il sera très difficile de ne pas avoir de conflits avec la caisse. Il faudra un suivi comptable et de patientèle quasi quotidien. Et il faudra pouvoir dire "vous n'êtes pas de ma zone, désolé je ne vous prendrais pas en charge sinon je risque de ne plus être dans les contraintes de mon contrat".

La rémunération de prise en charge d'un stagiaire me parait déplacée... Soit on instaure un réel contrat de prise en charge des stagiaires égalitaire entre tous, soit on ne fait rien. Mais une demie-mesure ségrégationniste par la localisation... Je suis perplexe.

 

Le titre 2 de cet avenant (refonte de la nomenclature) me choque particulièrement car il est plein de sens mais vide de texte !

En effet, nous découvrons que l'actuelle nomenclature n'est pas assez descriptive et qu'elle sera étudiée ultérieurement !

Autant nous attendre à une belle usine à gaz !

Attention toutefois au calendrier, à savoir fin du premier semestre 2018, donc quasi conjointement avec la mise ne place de l'ensemble des mesures de l'avenant.

Je flaire le piège à 500 lieues. Pourquoi ne pas avoir fait cela en amont ? Pourquoi ai-je l'impression d'être pris pour le dernier des imbéciles ? Iriez vous signer quelque chose à l'aveugle mais qui contraindra la profession sans même savoir à l'avance de quoi nous parlons ?

En effet, même si l'on va argumenter que ce seront des discussions, que rien n'est fait etc... Laissez moi vous mettre en garde.

 

À l'UNCAM, tout est déjà écrit

Et cette volonté d'en discuter plus tard pourrait cacher simplement le fait qu'ils savent que cela pourrait remettre en cause la signature de l'avenant. Cela ne présage rien de bon. N'en doutons donc pas, la refonte de la nomenclature sera à notre encontre.

Notez aussi des petites phrases qui semblent anodines mais qui ont leur importance, comme la dématérialisation et la transmission du BDK qui de fait deviendrait quasi obligatoire avec la remise d'un document au patient.

Alors oui le BDK va être augmenté mais pensez bien que les frais liés à sa transmission et à la remise d'un document au patient seront à votre charge... Vous souvenez vous combien votre éditeur de logiciel vous a demandé pour le module SCOR ?... Et combien il vous facture la "maintenance logicielle" à l'année ?

Méfiance, le BDK augmentera, mais au final nous y perdrons…

 

Sur le même thème, les aides à l’informatisation seront reformulées.

Ainsi les critères d’admissibilité au forfait annuel augmentent.

Votre logiciel devra être certifié HAS et compatible DMP et compatible avec le recours aux téléservices tels que l’applicatif ADR i.

N’en doutez à aucun moment… cela aura un prix et votre éditeur de logiciel s’en frotte déjà les mains.

il vous faudra aussi avoir une messagerie sécurisée dont le coût vous incombera aussi…

Les 490€ annuels promis ne sont rien face à ce que nous dépensons annuellement en frais informatiques, maintenance logiciel etc…

 

Toujours dans l'idée des "points de détails", la convention peut être résiliée par différents moyen dont "modifications législatives ou réglementaires affectant substantiellement les rapports entre les organismes d’assurance maladie et les masseurs -kinésithérapeutes", or Monsieur Macron a promis la suppression du RSI, ce qui entrainerait une modification de la sections sociale de la commission paritaire nationale, régionale et départementale, ce qui constituerait une modification affectant les rapports entre les organismes d"assurance maladie et les kinésithérapeutes... Cela pourrait donc être un bon moyen de reformuler une convention à ce moment là... Messieurs-dames, dirigeants des syndicats représentatifs, la balle est dans votre camp.

 

Attention, de nouvelles sanctions sont applicables liées au zonage. En effet la pratique d'une activité spécifique pouvant permettre d'exercer en zone sur dotée, si le taux de pratique de cette activité spécifique n'est pas atteint, le professionnel se vera déconventionné dans la zone.

Être interdit d'exercice pendant 1 mois n'est jamais plaisant mais je dirais que c'est "gérable" (ne prenez pas mon propos pour une insoumission générale, loin de là, je suis pour le respect de la convention, même si elle est mauvaise). Par contre être interdit d'exercice dans une zone, implique un déménagement, ce qui est beaucoup moins gérable et largement plus coûteux. Sachant que lorsque l'on est déconventionné, il est impossible de se faire remplacé ou d'être remplaçant, la procédure est stricte et ferme.

Attention aussi à l'apparition d'une procédure exceptionnelle de déconventionnement.

Dans le cadre d'un dépôt de plainte par l'organisme de sécurité sociale suite à une fraude (article L114-9 du code de la sécurité sociale) qui dépasserait 8 fois le plafond mensuel, soit 26152€ pour 2017, le déconventionnement est à la discrétion du directeur de la caisse. et si 26000€ vous parraissent "énormes" pensez que sur 5 années (délai maximal pour notifier une fraude) cela ne représente que 5200€ par an... à méditer.

Voilà pour les quelques "détails" que j'ai relevé.

 

Pourquoi l'UNCAM ne réparti pas l'argent sur une augmentation de la lettre clé ?

La réponse est simple. L'UNCAM a des obligation en matière d'objectifs prioritaires de santé.

Elle a donc un budget défini à ce titre et doit prouver qu'elle a agit dans ces domaines. Et ce budget ne peut en aucun cas aller à une autre prestation.

Une fois que l'on a compris cela, on s'aperçoit que cet avenant ne fait que répondre aux objectifs prioritaires de santé et que le reste n'est que saupoudrage destiné à nous plaire, ou presque.

Nous ne sommes pas responsables des erreurs de santé publique et des différentes politiques catastrophiques menées depuis des années. Politiques que nous dénonçons largement depuis des lustres.

Que l'UNCAM se débrouille avec ses obligations et qu'elle rémunère correctement les acteurs de santé, point à la ligne.

Je pense qu'il faut être forts et montrer à l'UNCAM que nous ne sommes pas des moutons et que non, nous ne signerons pas cette mascarade.

Personnellement si j'étais en mesure de signer cet avenant, je ne signerais pas, non pas à cause de modalités de rémunération qui sont de la poudre aux yeux, non, mais à cause des multiples pièges qui sont inclus dans cet avenant et qui auront des impacts dans l'avenir sans que nous puissions y faire quoi que ce soit.

Il faudrait soit avoir un intérêt particulier soit avoir une lecture plus que superficielle pour croire que ce texte est bon et qu'il faille le signer.

 

Et la FFMKR ?

Celle-ci est resté assez "muette" durant l'ensemble de la négociation, c'est ainsi avec plaisir que j'ai pris connaissance des positions de la FFMKR.

J'ai trouvé dommage ce long silence de six mois hormis quelques mails et communications via des sections départementales très ciblées, mais cependant, stratégiquement je le comprends et finalement, à la vue de ce que l'hypercommunication du SNMKR (et pas de l'Union) a apporté, il me semble que la stratégie de la FFMKR était la bonne solution.

À noter surtout, l'absence très intelligente de commentaires des "lieutenants" de la FFMKR sur l'ensemble des réseaux sociaux. Cela démontre une certainement forme de hiérarchie au sein du syndicat et de l'autorité nécessaire au maintien de l'ordre en son sein.

Je ne suis pas partisan de la FFMKR pour pleins de raisons, cependant, je dois avouer que leur politique interne autours de ces négociations est mille fois plus respectueuse que celle du SNMKR.

Ils se sont réunis en congrès, ont fait voté les sections départementales, ont à priori pris en considération leurs adhérents et ont adopté le vote en conséquence.

C'est là une vraie politique syndicale et surtout une vraie démocratie participative. Que certains autres en prennent exemple...

 

Bref, aujourd'hui nous le savons, suite à leur congrès, il a été décidé de ne pas signer cet avenant. Peut être ont ils eu une analyse plus approfondie du texte et ont su voir les quelques pièges posés de ci de là.

Voilà, c'était mon analyse de cet avenant et de négo-kiné qui aurait pu être un outil formidable mais qui finalement a eu l'effet d'une tornade dans un verre d'eau mais qui aura un effet boomerang je pense important sur le SNMKR. Ce qui est sur, c'est que moi, j'ai la mémoire longue...

Si vous avez noté des choses que je n'ai pas relevé, ce qui est fort probable, n'hésitez pas à me contacter (This email address is being protected from spambots. You need JavaScript enabled to view it.).

 

Vincent Jallu