Nuages

À l'occasion du salon rééduca 2016, le SNMKR a mis en place la plate-forme nego-kine.fr pour essayer de faire un projet autours des négociations conventionnelles.

Il faut l'avouer, graphiquement la dite plate-forme est belle et soignée, l'idée originale est intéressante et il pouvait ressortir quelque chose de convenable de cette initiative.

De plus cette plate-forme était ouverte à tous, syndiqués ou non, membre de l'union ou non.

À noter aussi, le SNMKR a fait ses propositions d'idées mais a aussi demandé aux gens répondant à l'enquête, leurs idées, histoire de faire une belle démonstration de démagogie.

J'attire dès lors l'attention aux membre de l'Union... savez-vous que vous avez payé une cotisation (330€ au SNMKR, 140€ pour OK) pour que l'on vous demande votre avis ?

Savez vous que vous avez payé pour que votre idée soit validée (ou non) ?

Savez vous aussi, que finalement, moi qui ne suis pas adhérent, j'ai pu aussi donné mon avis et avoir une proposition validée, et ce, gratuitement ?

N'avez vous pas l'impression qu'il y ait comme un "léger malentendu" ?

Petit détail, c'est bien le SNMKR qui a présenté cette plate-forme alors que c'est l'Union (UNSMKL) qui est représentative...

Personnellement, un syndicat qui vient pomper les idées toutes venantes de l'ensemble de la population, puis qui se les réapproprie, les étiquette sous son nom et qui à la fin se présentera comme le héros du jour, je ne considère pas cela comme un syndicat mais comme association démago-populiste qui n'a qu'un but, se mettre en avant et soutirer les cotisations de ses adhérents.

Et toutes celles et ceux qui pensent que la critique est facile et que ces gens sont engagés et que si j'étais à leur place etc... Et bien mesdames messieurs, relisez simplement la définition de la démagogie et du populisme et vous verrez... 

 

Etude statistique

C'est bel et bien là que l'on commence à prendre la mesure de l'incohérence totale du projet (au cas où vous n'auriez pas compris que déjà le fondement du projet était une erreur).

Premièrement, l'échantillon !

Le SNMKR a souhaité ouvrir sa plate-forme à l'ensemble de la profession. Excellente idée. Oui, mais... Comment l'échantillon a t il été validé ?

En effet, a t on l'assurance que l'ensemble des réponses furent données par des kinésithérapeutes ? Qui plus est des kinésithérapeutes libéraux ? D'autant plus quand le formulaire d'inscription prévoit le fait de ne pas être kinésithérapeute !

Ne pensez-vous pas que les résultats pouraient prendre une allure tout à fait différente si on apprenait que des membres de l'UNCAM aient pu répondre ?

À partir du moment où l'échantillon même ne peut être validé, c'est l'intégralité des résultats qui s'écroulent...

Poursuivons... L'Union a son actif 3631 adhérents pour l'année 2015, chiffre qui a été déclaré pour l'enquête de représentativité, donc vérifié et fiable. Je me baserais donc sur 3600 adhérents à jour de cotisation pour l'année 2016.

Nego-kine a obtenu 874 participations... Tout en ayant à l'esprit que tous les kinésithérapeutes pouvaient y participer, aucun besoin d'être de l'Union... Si l'on considère que les réponse ont été faites uniquement par les membres de l'Union, il est remarquable qu'à peine 1/4 des adhérents de l'Union ait répondu. Si j'étais dirigeant de l'Union, je m'interrogerais vraiment ! Cela est un signe, tout de même, que cette plate-forme n'ait pas séduite les membres du syndicat. Et si l'on considère qu'au moins 30% des réponses sont issues "de l'extérieur", le résultat est d'autant plus catastrophique.

Comme cette "étude" a été présentée à toute la population, il est de fait notable que 874 participants, face au 80 000 libéraux... cela représente à peine plus d'1% de la population totale.

Le SNMKR nous explique donc qu'il va tirer des conclusions et faire des propositions à partir d'un échantillon statistique d'1%.

Notons aussi que sur les 874 participants, il y a eu 10307 votes, soit environ 12 votes par personne. Or, il y avait à l'origine 19 propositions faites par le SNMKR. Cela veut implicitement dire que les participants n'ont pas jugé bon de répondre à chaque question.

Là aussi, il y a à s'interroger sur les propositions faites.

Qui plus est, lorsque l'on étudie plus avant les résultats, on s'aperçoit que l'étude ne considère pas la majorité absolue mais la majorité relative à chaque item.

Heureusement, on nous précise que les propositions ayant reçues moins de 10 votes ont été écartées. Vous avez bien lu, 10 votes. En considérant la majorité relative, si 6 personnes sur 80 000 ont répondu positivement à une question et que seules 4 ont répondu défavorablement, la proposition est validée. Cela représente 0,0075% de la population. N'est-ce pas triste ? non, c'est aberrant !

Remarquez... Vu qu'aucune des question n'a obtenu la majorité absolue... il valait mieux arranger les choses à son avantage plutôt que de se retrouver comme un guignol sans données utilisables. En effet, le "meilleur score" revient à la proposition "refonte totale de la nomenclature" avec 427 "pour" soit 48,9%, on y était presque, dommage.

Au final, l'échantillon n'est pas fiable, ni quant à sa composition, ni quant à sa représentativité. L'implication de la population a été très faible et l'implication des syndiqués du syndicat proposant la plate-forme a été tout aussi basse.

Il faut donc prendre ces résultats pour ce qu'ils sont, à savoir sans aucune valeur. Mais je le redis, cette plate-forme a le mérite d'exister et c'était une bonne idée.

 

On m'a répondu sur les réseaux sociaux que cette plate-forme avait couté cher à la façon "C'est cher donc c'est bien" !

Et bien non, si c'est cher, c'est le problème de celles et ceux qui ont mis en place cette plate-forme. Ensuite c'est le problème des adhérents. Avec 1500 réponses, on soupçonne déjà que ces mêmes adhérents n'y ont pas trouvé d'intérét.

Ensuite, histoire de chipoter, un nom de domaine, 10€ Par an, un hébergement vu la fréquentation 20€ par mois, un graphiste pour la conception de la charte graphique 600€, l'informaticien pour la mise en place 800€, à peu près la même sommes pour la création du module statistique, total 2400€... (si vous avez payé plus cher, messieurs dames de l'Union, faites jouer la concurrence, car c'était trop cher... même si je sais que c'est par le biais de Cap Collectif que la plate-forme a été créée, donc j'ai une bonne idée du tarif au moins pour cette partie).

Que les négociateurs affichent combien ils ont touché en terme d'indemnités tout compris au cours des négociations et nous nous apercevrons que finalement le coût de cette plate-forme est ridicule comparativement aux sommes engagées par les représentants. Là encore, ce n'est pas une critique, mais c'est ma réponse au "la plate-forme a couté cher"...

 

Quels sont les résultats ?

Lors de la présentation des résultats les critiques sur l'ensemble des médias fusèrent. En effet, la communication ne fut pas à la hauteur de l'événement et au lieu de présenter les résultats analysés, seuls les résultats furent avancé... Erreur de communication, ce n'est pas très important.

 

Non les premiers vrais résultats commencèrent le 21 janvier. En effet, l'Union nous a formulé une de ses vieilles idées à savoir la séance à tarif unique et positionnée à 21€.

Devant le tollé sur les réseaux sociaux, cette proposition a évoluée et l'Union est venue piller les proposition qu'Alizé avait faites à monsieur Revel (président de l'UNCAM) en réunion pré-conventionnelle. Ainsi l'Union a proposé le 27 février un "rassemblement" sur les propositions tarifaires en incluant Alizé. Si la manoeuvre politique était intelligente, malheureusement il n'y a pas eu grande suite (et je considère que c'est vraiment dommage).

 

Entre temps, le 1er février, l'Union nous a proposé les "BACKs" basé sur la charte d'Ottawa de 1986 organisée par l'OMS. En dehors du fait de la présentation un peu pompeuse les "BACK" n'ont eu aucun succès.

En effet, les "BACK" ne sont que des consultations de prévention sans grande envergure, ni chiffrée en temps ou en rétribution, pas de positionnement syndical précis. Et si la consultation de prévention présente un réel intérêt, le "BACK" ne semble pas avoir trouvé sa place.

D'ailleurs, à priori, l'Union a fait BACKward sur ses BACKs !

Dommage, l'idée n'est pas mauvaise mais aurait du être largement mieux travaillée et surtout approfondie.

 

Enfin, suite à la réunion du 21 avril, l'Union nous propose finalement la facturation du BDK à la première séance (ce qui est aussi une proposition faite par Alizé l'année dernière) ainsi quelques saupoudrages de ci de là.

Non la vraie annonce de l'Union c'est le fait que, je cite, "A la fin, ce sont les adhérents de l’Union qui prendront position pour la signature ou non de la convention."

Cette simple phrase m'a laissé sans voix...

En effet, à quoi sert un syndicat si finalement il ne propose rien et n'agit en rien ?

En tant que syndiqué, j'attends que mon syndicat me représente et prenne les décisions définies par la politique mise en place au préalable.

Si c'est moi en tant que syndiqué qui doit prendre les décisions, à quoi me sert le syndicat ? Juste à apposer une signature ? Non, dès lors le syndicat ne sert plus à rien.

Sur ce point on peut reprocher beaucoup de choses à la FFMKR ou à Alizé, mais au moins, ils ont toujours eu le courage de leur politique interne.

Il y a en plus un précédent assez proche puisqu'il date de l'année dernière concernant un syndicat et une signature de convention.

Pour rappel, ou pour information pour celles et ceux qui ne suivent pas les actualités conventionnelles, la FMF, syndicat représentatif des médecins, était contre la signature de leur convention au printemps-été 2016.

Fin août 2016, la FMF a effectué un vote interne pour valider ou invalider son avis. Malheureusement, comme il fallait s'y attendre, fin août, en pleine période de congés, la participation fut faible.

Ainsi ce sont un peu plus de 400 médecins qui ont engagés les 110 000 médecins libéraux dans la signature de la dite convention contre toute attente.

Pire, ce sont majoritairement des médecins "Parisiens" qui ont voté pour la signature, créant ainsi une fracture Paris-Province...

La FMF a regrêté cette histoire et font tout actuellement pour remettre en cause ce qui a été acté.

Nous concernant, si l'Union est contre cette convention, il suffit de ne pas la signer plutôt que de se cacher derrière ses adhérents. Le clientélisme est la pire des solutions .

Seuls ceux qui ont participé aux négociations sont à même de discerner si il y a ou non possibilité de réelle discussion. Seuls ceux qui maitrisent l'ensemble du système politique de santé sont à même de savoir si il y a des leviers externes à activer à postériori. Seuls sont ceux qui maitrisent le système conventionnel pour savoir ce qu'est un arbitrage, comment il s'organise et surtout par qui, savent ce que cela implique. Pensez vous réellement au SNMKR que l'ensemble de vos adhérents maitrise tout cela ? Et pensez vous réellement qu'avec moins de 25% de participation à votre plate-forme dans le meilleur des cas, il y ait une réelle légitimité à cette action ?

Ne pensez vous pas que seuls ceux qui possèdent l'ensemble des tenants et aboutissants devraient se positionner de manière forte et déterminée, comme doivent l'être les dirigeants syndicaux ?

 

C'est pourquoi je considère que la décision de l'Union est une erreur politique et syndicale majeure. Nous verrons si l'impact sur la structure syndicale même aura lieu comme cela a eu lieu a la FMF...

 

Conclusion

Au final, nego-kine à l'origine démagogique a sombré dans le populisme pour masquer le défaut de volonté d'engagement du SNMKR.

C'est fort dommage car l'idée aurait pu être excellente si elle avait été correctement menée.

En effet, limiter les réponses aux membres du syndicat aurait supprimé les problèmes d'échantillon et surtout aurait considéré les adhérents du dit syndicat. Ouvrir à tout prix au public le plus large était sur le papier une "grande" idée, mais dans l'intérêt syndical un écueil. Si l'adhérent n'a plus d'intérêt à adhérer, il n'adhère plus. À l'inverse si le quidam se voit pris en compte alors qu'il n'est pas adhérent, il n'a aucun intérêt à adhérer.

En allant encore plus au-delà, cette plate-forme démontre le total désintérêt des kinésithérapeutes pour leur profession et leur avenir. Lassitude ? Persuasion que rien ne peut changer ou avancer... C'est bien dommage.

Pour finir, les réseaux sociaux et la diffusion par voie électronique sont totalement surévalués, la faible participation le montre. La diffusion par voie postale a un coût pharamineux en comparaison à la voie électronique, j'en suis bien conscient mais les bases de données de mailing sont trop incomplètes, et les réseaux sociaux ne sont finalement là que pour trouver un assistant, un remplaçant... J'avais proposé qu'il y ait une réelle alliance syndicale et ordinale. Les 3 syndicats demandant à l'ordre un mailing de l'ensemble de la profession pour que l'ensemble des professionnels soient touchés... Malheureusement, l'idée n'a pas aboutie.

Alors oui cela se développe tout doucement, il y a des idées émergentes qu'il faut savoir écouter. Mais j'espère que le SNMKR tirera les leçons de tout cela.

 

 

Vincent Jallu.