Nuages

Je vous rassure, je ne vais pas commenter les 33 propositions du ministre de la santé (à lire ici), non. Autant vous le dire de suite, nous avons été totalement oubliés, tant sur le point de la kinésithérapie salariée que de celui de la kinésithérapie libérale. Si j’ai bien lu, le mot kinésithérapie n’est cité que 2 fois dans l’ensemble des 56 pages du rapport !

 

Les états généraux de la kinésithérapie ont été une totale mascarade (à lire ici), aucune proposition sérieuse et aucune avancée. Juste du nombrilisme pour flatter les égos. Il en est ressorti des propositions pour le Ségur qui n’ont bien sur été ni écoutées ni entendues. La kinésithérapie salariée n’intéresse plus personne et la kinésithérapie libérale va suivre le même chemin.

Les deux seules propositions traitant de la kinésithérapie sont pour recruter au sein de l’hôpital des libéraux à statut de fonctionnaire à temps partie et la revalorisation des indemnités de stages des étudiants. Voilà c’est tout pour nous.

Alors oui, les kinésithérapeutes salariés vont bénéficier des la hausse de salaire promise… Ils vont passer d’un salaire indécent à un salaire moins indécent. Super… Ils vont aussi bénéficier des quelques points de détails mais rien sur le fond des problèmes et surtout sur l’attractivité.

À noter cependant, ce rapport parle d’améliorer et augmenter les pratiques avancées des IDE… Mais là encore, les kinés… Oubliés !

 

Le fond

Le gouvernement nous avait promis des réformes de structures et de fond. Et bien, il y en aura… Et bien sur, pas dans le bon sens comme chacun aurait pu s’y attendre. 

Toujours et encore, l’état s’évertue à opposer médecine de ville et médecine hospitalière. Dans cet affrontement, l’ONDAM joue un rôle essentiel. En effet (à lire ici), lorsque l’on donne d’un côté, il faut reprendre de l’autre pour équilibrer les comptes.

 

L’exercice libéral est purement et simplement menacé. Les compagnies d’assurance et autres mutuelles vont avoir la main mise sur un gros gâteau par le biais des téléconsultations qui pourraient être ouvertes en dehors du parcours de soin coordonné. Vous aviez peur des réseaux de soins ? Et bien les voilà actés.

Les ARS vont encore renforcer leur pouvoir sur les structures libérales. Tout le puzzle qui a été mis en place pour MaSanté2022 reste inchangé. Perte d’autonomie des praticiens, regroupements, coordination par territoire et non par logique de soins etc… Les financements du monde libéral sont confirmés comme évoluant vers des forfaitisations par le biais des structures et non par le biais de l’activité de chaque professionnel. Pire l’exercice pourra être coordonné par les structures hospitalières et le financement partagé comme il était prévisible.

 

J’avais écrit il y a quelques temps que le masseur-kinésithérapeute devrait s’adapter et devenir un chasseur d’indemnités. Il est clair aujourd’hui que si les kinésithérapeutes ne s’investissent pas à minima dans les différentes structures et si ils ne s’investissent pas dans les réflexions politiques des territoires il y aura alors 2 types de praticiens. Ceux qui se débrouillent et les autres. Les premiers auront les financements et s’en sortiront. Les seconds, pardonnez moi expression, crèveront la gueule ouverte !… Les paiements à l’épisode de soins et à la coordination de parcours sont écrits, le paiement à l’acte va disparaitre.

Sachant que le problème de la territorialisation est qu’il est très difficile de changer de territoire. C’est le piège fondamental des CPTS (à lire ici). Si vous voulez changer de CPTS il faut déménager son cabinet dans un autre territoire. Pire, mettez en parallèle le conventionnement sélectif et vous avez gagné le jackpot !

Une fois les territoires verrouillés, les ARS conjointement avec les établissements feront ce qu’elles voudront à l’intérieur en ne finançant que les objectifs qui les intéressent elles. Et si vous croyez vraiment que la kinésithérapie sera au coeur du système, alors vous n’avez vraiment pas lu le rapport du Ségur de la Santé.

 

La forme

Il n’y a pas de forme. Le constat est simple, « nous vous avons méprisé avec MaSanté2022, nous avons continué avec le Ségur de la Santé ». Voilà ce qu’il faut retenir du Ségur. 

 

Conclusion

L’état ne fait que répéter les erreurs et n’a rien compris des vrais problèmes de fond. Personne n’a été écouté et vu comment l’organisation du dit Ségur a été faite, il était plus que logique que la kinésithérapie soit totalement oubliée.

Le monde libéral est plus que jamais mis sous tutelle, des structures hospitalières, des ARS et des assurances privées.

Plus que jamais il va être important de s’investir en région, principalement en ce qui nous concerne au sein des URPS. Il va être vitale, de s’intéresser à la politique de santé en local. Si vous ne faites pas l’effort de comprendre comment le système va se mettre en place, comment il fonctionne et comment vous pourrez tirer votre épingle du jeu, alors vous serez le maillon faible, au revoir.

 

Il va falloir aussi repenser notre représentativité à tous niveaux. La représentativité conventionnelle nationale va perdre de son intérêt tandis que la réprésentativité en régions va devenir primordiale. Les professionnels doivent reprendre la main sur l’offre de soin locale, ne pas se laisser marcher sur les pieds par l’ordre qui se croit tout permis et qui n’a pas pour mission de diriger ni les territoires ni les professionnels. Les URPS doivent réagir et monter au créneau car elles vont devenir l’interlocuteur principal des territoires

 

Vincent Jallu